L’œuvre de Niki de Saint Phalle est un ensemble de travaux fascinant à découvrir. Entre tableaux, sculptures ou autres films, l’artiste franco-américaine nous embarque dans un monde inspiré de sa vie et de ses engagements en faveur des minorités.
Par Vivien Delorme-Bernhardt

L’ensemble de l’œuvre de Niki de Saint Phalle est un incontournable du XXème siècle. Elle naît dans une famille aristocratique à Neuilly-sur-Seine en 1930. En effet, son père était le directeur de la banque New Yorkaise Saint Phalle & Co. Néanmoins la fortune familiale a été fortement touchée par le krach boursier de 1929. De plus, le jeune femme a rapidement montrée un caractère rebel et s’est toujours opposé au puritanisme religieux et au maccarthysme
L’artiste passe ainsi les premières années de sa vie chez ses grands-parents dans la Nièvre, avant de rejoindre ses parents, réinstallés aux États-Unis.
Un événement marquant pour son art
À l’âge de 11, Niki de Saint Phalle est violée par son propre père. Elle expliquera régulièrement que ce moment est resté un traumatisme éternel. C’est en partie pour cela qu’elle décide de se lancer dans l’art, un moyen pour elle de : “calmer le chaos qui agitait son âme et de fournir une structure organique à sa vie”.
Avant de se spécialiser uniquement dans l’art, Niki de Saint Phalle débute sa carrière en tant que mannequin pour Vogue et Life Magazine. Dans le même temps elle épouse, à l’âge de 18 ans, l’écrivain Harry Mathews. En 1949, un an après son mariage, elle donne naissance à Laura, son premier enfant et déménage à Paris.
Les années 50 ; un tournant pour l’oeuvre de Niki de Saint Phalle
À partir de 1953, Niki de Saint Phalle entre dans une période de dépression qui l’a conduit à être hospitalisée à Nice. C’est durant son rétablissement qu’elle se consacre pleinement à l’art, notamment la peinture et le dessin.
En 1955, son deuxième enfant Philippe naît et elle déménage alors en Espagne. Elle y fait une rencontre importante, celle de l’architecte Antoni Gaudi, dont elle s’inspirera largement.
Sa rencontre avec Jean Tinguely lui permet de rejoindre le groupe des Nouveaux réalistes créé par Yves Klein et Pierre Restany. Leur travail consiste principalement à transformer le réel urbain et industriel en un tableau plus poétique.
Premiers travaux importants dans les années 60
En 1961, à l’exposition de la galerie J, elle dévoile sa première série de tableaux, les Tirs. Ces œuvres sont toutes réalisées à l’aide d’une carabine. En effet Niki de Saint Phalle est une tireuse chevronnée. Ainsi, elle tire sur des tableaux sur lesquels des poches de couleurs sont disposées. Celles-ci libèrent alors leur peinture pour donner à voir une toile déstructurée. Le tir est donc un acte symbolique qui doit représenter l’exorcisation des maux et tuer ce avec quoi elle est en désaccord. Cette série d’œuvres scandalise un grand nombre d’observateurs mais lui offre une reconnaissance internationale.

Niki de Saint Phalle s’engage également pour le droit des personnes Noires. Ainsi, elle crée l’œuvre My Heart Belongs to Black Rosy en 1965. Ce tableau en papiers collés et résine est une référence probable à Rosa Parks. On y retrouve une Nana aux larges épaules et au corps noir qu’on rencontrera dans de nombreux autres travaux.
Diversification et succès grandissant
Niki de Saint Phalle est bien plus qu’une simple peintre. En effet, son œuvre est extrêmement large et diversifiée. Après son mariage avec Jean Tinguely en 1971, elle dévoile Daddy, un film peu connu mais très profond. En collaboration avec le réalisateur Peter Whitehead elle y présente sa relation avec son père, une sorte de règlement de compte psychanalytique. On comprend à travers ce long métrage toute l’ambiguïté de cette relation : entre violence, perversion sexuelle et amour.
L’artiste française prend également part à des projets monumentaux comme le Jardin des Tarots. Niki de Saint Phalle consacre près de 20 ans à l’élaboration de ce jardin en plein cœur de la ville de Capalbio en Italie. Avec Jean Tinguely et d’autres artistes, elle construit une œuvre grandeur nature, basée sur 22 arcanes majeures du tarot. Certaines constructions, recouvertes de mosaïques, sont même habitables.
Une artiste engagée
L’engagement. Si un mot pouvait décrire cette artiste complexe, ce serait probablement celui-ci. En intégrant des moments de sa propre vie dans ses oeuvres, elle dépeint l’image d’une femme libre qui ne veut, en aucun cas, appartenir à un homme. Une opposition parfaite à l’éducation qu’elle avait reçue étant jeune. Cet engagement pour la liberté des femmes se retrouve notamment dans ses Nanas. Des sculptures imposantes, qui mettent l’accent sur la féminité en insistant sur les formes et les rondeurs. Ces œuvres ont traversé les époques et sont aujourd’hui encore des symboles du féminisme. Pour Niki de Saint Phalle, ces femmes sont : “elles-mêmes, elles n’ont pas besoin de mecs, elles sont libres, elles sont joyeuses”.
L’artiste reste engagée toute sa vie pour défendre les minorités comme les personnes noires ou pour s’engager dans la prévention face au développement du SIDA.
Où retrouver les œuvres de Niki de Saint Phalle aujourd’hui ?
Niki de Saint Phalle s’est éteinte en 2002 à San Diego. Aujourd’hui, bon nombre de ses travaux sont exposés dans des musées. À Paris on peut en voir au musée des Arts Décoratifs, des Arts Modernes ou encore au Centre Pompidou. Cet été, le Caumont-Centre Art d’Aix-en-Provence dédiera une exposition à l’artiste française. Une occasion parfaite pour découvrir ou redécouvrir un univers fascinant.